Je voudrais entamer mon propos en vous remerciant sincèrement d’avoir répondu présent à notre invitation dans des délais aussi courts. Notre invitation ne vise nullement à influencer vos lignes éditoriales ou le traitement que vous faites de ce qu’il convient désormais d’appeler l’affaire GICAM. Nous voulons simplement mettre à votre disposition des faits et révéler au grand jour toutes les contre-vérités et les non-dits du projet de fusion entre le GICAM et l’ECAM. Mon propos s’articulera autour de quatre points. Après une brève présentation, je déclinerai les raisons pour lesquelles je suis fermement opposé à ce projet qui vise à faire disparaître le GICAM. Par la suite, je ferai une présentation des démarches entreprises jusqu’à ce jour à l’effet de faire échec à ce funeste projet. Et enfin je me permettrai de vous partager la vision que je me fais de notre organisation patronale.
- Présentation du PDG de MIT CHIMIE
Avant de rentrer dans le vif du sujet, j’ai souhaité me présenter à vous, pour ceux qui ne me connaîtraient pas. Je suis Emmanuel WAFO FOKO, PDG de MIT CHIMIE. Je suis camerounais, âgé de 55 ans, marié et père de 03 enfants.
Je suis membre du GICAM depuis 2005, soit 18 ans aujourd’hui. J’y ai assumé et assumé encore un certain nombre de responsabilités. A titre d’illustration, entre 2014 et 2016 j’ai été membre du Conseil Exécutif cumulativement avec la fonction de Président de la Commission Protection de l’Industrie Locale. Et, depuis 2019, je suis président de Commission de l’Economie et Développement de l’Entreprise au sein de notre auguste organisation.
Comme bon nombre de membres avec qui j’échange régulièrement sur la situation qui a cours au GICAM, le temps passé au sein de cette organisation m’a permis de développer un certain attachement à son égard, du fait entre autre que celle-ci a favorisé la croissance de mon entreprise qui est passée d’une TPE de 10 employés à une entité de plus de 250 agents aujourd’hui.
- Les fondements de notre opposition au projet de fusion GICAM – ECAM se déclinent en trois points
Comme vous le savez tous, le GICAM va tenir son AGE mardi prochain, le 11 Juillet 2023. Au cours de celle-ci, il sera proposé aux adhérents d’entériner le projet de fusion avec ECAM. Notre opposition à cette fusion, ne vise ni plus ni moins qu’à défendre le respect de l’éthique et des règles de gouvernance du GICAM : le projet de fusion qui est soumis à la validation de l’AGE du GICAM le 11 juillet ambitionne d’ACTER DEFINITIVEMENT LA DISSOLUTION DU GICAM POUR CREER UN AUTRE MOUVEMENT DONT PERSONNE NE MAITRISE LES CONTOURS A CE JOUR.
Faut-il le rappeler, le GICAM a 67 ans d’existence et le chemin parcouru a été jonché de défis que les pères fondateurs et les générations actuelles ont su et pu relever grâce au travail acharné de tous et à des efforts qui ont permis de faire du GICAM plus qu’une organisation, une véritable institution dans l’environnement camerounais. Mieux, aujourd’hui le GICAM est une marque, un patrimoine national. Le traité de fusion signé le 05 avril sans mandat de l’AGE consacre explicitement la mort du GICAM sans toutefois présenter clairement l’alternative. De manière invariable, il y est fait référence à « la nouvelle centrale patronale », « une Assemblée Générale Constitutive », « de nouveaux statuts », « fusion-création », sans plus !
La réception enfin des éléments du dossier de fusion nous a permis de découvrir d’autres incongruités qui renforcent mon opinion sur les raisons inavouées de cette fusion. Mais dans le même temps, elle renforce ma détermination à continuer à sensibiliser les membres, l’Etat et l’opinion publique sur la gravité, les risques multiformes et les conséquences néfastes de cette démarche.
De mon point de vue, cette opération repose sur un tissu de mensonges visant le seul et unique but de brader le patrimoine matériel et immatériel de notre Maison commune, le GICAM. Sinon, comment expliquer que l’évaluation faite des apports du GICAM estime la valeur de notre immeuble siège à 0 FCFA et la valeur du terrain de 1366 m2 en plein cœur de Bonanjo à 125 000 000 FCFA ? Bien plus, comment comprendre que les actifs immatériels du GICAM tels que les productions intellectuelles, les structures d’accompagnement des entreprises et autres ressources générées par ses activités ne soient pas pris en compte dans le rapport d’évaluation rendu par le commissaire à la fusion ?
Sur un tout autre plan, nous soutenons l’idée que cette procédure est entreprise en violation des principes d’éthique et de droit. La fusion d’après ses initiateurs entraine la modification des statuts du GICAM. Or d’après l’article 12 desdits statuts, seule l’Assemblée Générale Extraordinaire a compétence pour connaitre de la modification des statuts. Or aucune Assemblée Générale ne s’est réunie à ce jour pour débattre de ce projet qui semble acté. Plus grave encore, toute la cuisine se serait faite au niveau du Conseil d’Administration du GICAM ; or ce Conseil d’Administration a des attributions clairement définies à l’article 14 alinéa 4 des statuts du GICAM. Il n’a aucune compétence en ce qui concerne la modification des statuts.
Comble de paradoxe, le traité de fusion fait référence à la fois (i) à une Assemblée Générale constitutive d’une nouvelle organisation ayant ses propres statuts et (ii) à une modification des statuts du GICAM. Bien plus il y est clairement stipulé que « Monsieur Célestin Tawamba, ès qualité de Président du GICAM, et au nom de cette institution, déclare qu’il sera proposé aux membres du GICAM réunis en Assemblée Générale Extraordinaire, d’entériner le présent Traité de fusion dans les conditions prévues par les statuts du GICAM ». Or l’article 12 des statuts du GICAM qui définit les compétences de l’Assemblée Générale Extraordinaire indique de manière pertinente que cette instance statue sur « les modifications des statuts du Groupement ». Plus loin, l’article 26 traitant de la dissolution stipule que « La dissolution ne peut être prononcée que par l’Assemblée Générale Extraordinaire conformément aux prescriptions légales… ». En définitive, s’agit-il (i) de la modification des statuts, (ii) de l’adoption du Traité de fusion, (iii) de l’adoption des nouveaux statuts de la nouvelle organisation, ou (iv) de la dissolution du GICAM ?
Ce registre terminologique volontairement flou dévoile une volonté de dissimulation de la dissolution du GICAM sous le prétexte de la fusion. La violation des règles de transparence et la dissimulation aux membres des statuts de l’entité devant bénéficier du patrimoine du GICAM après dissolution en est la confirmation. La violation et le refus d’exécuter les décisions du Comité des Sages du GICAM en donne l’ultime confirmation.
Bien plus, l’absence d’encadrement juridique des opérations de fusion aussi bien au niveau communautaire, national qu’interne au GICAM a bel et bien été relevé par le Commissaire à la fusion. Mais fort curieusement il n’en tient pas compte dans ses conclusions. Il en est de même de la non prise en compte de certaines implications de cette démarche, notamment l’accroissement des engagements des membres du GICAM par incorporation du passif d’ECAM sans autorisation préalable ainsi que la prise en compte de l’incidence fiscale de la mutation des patrimoines. Tout ceci laisse planer le doute sur son objectivité.
- Les démarches entreprises pour la sauvegarde du GICAM
Dans le but de barrer la voie à cette curieuse démarche qui visiblement cherche à faire disparaitre le GICAM, j’ai entrepris un certain nombre de démarches auprès des membres du GICAM, auprès des autorités publiques et auprès d’opinion nationale et internationale.
Pour ce qui est des membres du GICAM, outre les rencontres et discussions entreprises avec plusieurs d’adhérents, j’ai saisi le Comité des Sages du GICAM, seul organe compétent en matière de contentieux interne au GICAM et qui statue en dernier ressort. En effet, l’article 17 des statuts du GICAM, dans son alinéa 2 traitant des attributions du Comité des Sages stipule entre autres que « Le Comité des Sages fait office de gardien des Statuts du Groupement et des principes fondamentaux qui sous-tendent la gouvernance et le fonctionnement du GICAM ». « II veille à l’application des statuts dans leur lettre et leur esprit, ainsi qu’au respect de la Charte éthique et de bonne gouvernance ».
Et en direction des autorités publiques, plusieurs actions judiciaires sont en cours, je ne saurais les commenter ici.
A l’endroit de l’opinion publique nationale et internationale enfin, j’ai commis une tribune de sensibilisation qui a été largement relayée dans différents types de média. Je voudrais profiter de cette occasion pour remercier ceux d’entre vous qui nous ont permis toucher de nombreux acteurs de notre vie économique et sociale. Je voudrais vous assurer de ce que notre action ne s’arrêtera pas à l’AGE de mardi prochain. Quelle qu’en soit l’issue, nous allons continuer le combat qui vise à conforter la position du GICAM sur l’échiquier patronal mondial, car en effet, la DEMOCRATIE ASSOCIATIVE puise toute sa richesse dans la diversité d’opinions et le respect des règles.
- Notre vision pour le GICAM :
Dans la perspective de SND30 et grâce à un dialogue public/privé plus constructif, nous pensons que le GICAM doit se positionner comme un acteur majeur du processus de construction de l’émergence de notre pays. Dans cette optique, le GICAM doit d’une part élargir son offre de services afin de mieux accompagner ses membres et de faire éclore de véritables capitaines d’industrie.
En effet, selon le RGE-2 de 2019, le tissu économique camerounais aujourd’hui est constitué de 97% d’autoentrepreneurs, soit plus de 200000 entreprises. Il faut les accompagner pour qu’elles grandissent et deviennent des Grandes Entreprises locales et sous régionales. Il faut former, orienter vers les secteurs clés identifiés, pour transformer structurellement notre économie et développer des champions nationaux. Il faut contribuer à créer des conditions pour favoriser les investissements locaux et Étrangers au Cameroun. Il faut améliorer la gouvernance pour attirer les partenaires au développement. Il faut favoriser la mise en place des PPP. Il faut travailler de concert avec l’état pour contribuer à créer la confiance afin de susciter une véritable relance de l’investissement au Cameroun, etc. Préserver les précieux acquis de 66 ans d’existence du GICAM.
En conclueison Mesdames et Messieurs les journalistes ce que je voulais partager avec vous. Il ne s’agit nullement d’un problème de personnes comme certains essayent de le faire croire pour noyer le poisson, ou d’une opposition menée par des frères du village. En conclusion, nous voulons agir ensemble, avec les membres du GICAM pour empêcher la dissolution de notre maison commune.
Par Emmanuel WAFO FOKO