7ème édition du Forum national pour la liberté de la presse et l’accès à l’information: voici la déclaration finale 

0
19

32ème JOURNEE MONDIALE DE LA LIBERTE DE LA PRESSE 

7ème EDITION DU FORUM NATIONAL POUR LA LIBERTE DE LA PRESSE ET L’ACCES A L’INFORMATION

06 MAI 2025 A L’HOTEL VALLEE DE PRINCE- DOUALA

Thème : «Désinformation et discours haineux : enjeu de la liberté de presse en contexte électoral »

DECLARATION FINALE

L’an deux mil vingt cinq et le 06 du mois de mai, dans le cadre des festivités marquant la 32ème Journée Mondiale de la Liberté de la Presse (JMLP), une soixante de femmes et hommes des medias, acteurs de la société civile et représentants des services déconcentrés de l’État, se sont réunis à Douala, à l’occasion de la 7eme édition du Forum pour la Liberté de la presse et l’accès à l’information, afin de passer en revue la thématique portant sur la désinformation et discours haineux : enjeux de la liberté de presse en contexte électoral.

Cette activité était portée par l’Ong, Un Monde Avenir, une Organisation Non Gouvernementale (ONG) créée par Arrêté n°00000022/A/MINATD/SG/DAP/SDLP/SONG, qui travaille sur les questions de développement social et de participation citoyenne, ce qui lui a valu d’être dotée du statut consultatif spécial de l’ECOSOC auprès de l’ONU ;

Ayant à l’esprit de placer l’Homme au centre de toute initiative de développement et en œuvrant pour promouvoir la culture de la citoyenneté, l’instauration d’une démocratie véritable et la bonne gouvernance, ses actions visent à influencer les décisions politiques aux niveaux national et international afin d’induire des changements ;

La proclamation du 3 mai Journée Mondiale de la Liberté de la Presse par l’Assemblée générale des Nations Unies en 1993, suivant la recommandation adoptée lors de la 26ème session de la Conférence générale de l’UNESCO en 1991, fut également une réponse à l’appel des journalistes africains qui, la même année, ont proclamé la Déclaration de Windhoek sur le pluralisme et l’indépendance des médias ;

Dédiant une journée mondiale de la Liberté de la Presse, les Nations Unies réaffirment que le journaliste en tant que contre-pouvoir joue un rôle crucial dans la construction d’une société durable ;

Conscient que sa célébration le 3 mai de chaque année est une manière de consacrer l’importance du journalisme et de la liberté d’expression dans un contexte mondiale de crise multiforme ;

Considérant que l’Unesco à travers le thème de la célébration de cette année reconnait que l’Intelligence Artificielle (IA) offre la possibilité de renforcer la liberté d’expression en démocratisant l’accès à l’information, en renforçant la communication mondiale et en changeant la réalité du flux d’informations dans le monde, mais présente également de nouveaux risques, car l’IA générative permet la création de contenus trompeurs tels que les « deepfakes », ce qui sape la confiance dans les institutions démocratiques, toute chose qui montre à suffire la pertinence connue de l’information en tant que bien public, comme il ressort dans la déclaration de Windhoek+30 de 2013 ;

Constatant qu’entre la célébration de cette Journée Mondiale de la Liberté de la Presse de 2025 et la prochaine de 2026, le Cameroun va organiser quatre élections, il devient urgent que soit instaurée une collaboration entre le gouvernement, les médias et la société civile pour relever le défi de l’accès à une information fiable pour la préservation de la paix au sortir de tous ces scrutins en contribuant au renforcement de la liberté de la presse et aux valeurs démocratiques, et non à leur érosion ;

Relevant que le préambule de la Déclaration Universelle des droits de l’homme de 1948 considère que la liberté d’expression est le moteur pour les autres libertés et droits de l’Homme. Cette liberté fondamentale est précisée à l’article 19 comme étant le droit de rechercher, de recevoir et de diffuser des informations et des idées par quelque moyen d’expression que ce soit et sans considération de frontières.

C’est fort de cela que chaque année, à l’occasion de la célébration de la Journée Mondiale de la liberté de la Presse, l’Ong Un Monde Avenir réunit les journalistes, les professionnels des médias, les universitaires, les décideurs publics avec le soutien des partenaires techniques au développement, à l’instar de la CCFD Terre Solidaire, dans l’optique de célébrer les principes fondamentaux de la liberté de la presse, évaluer la liberté de la presse à travers le monde et particulièrement au Cameroun, défendre l’indépendance des médias et de rendre hommage aux journalistes qui sont pris pour cibles, en ligne et hors ligne et dont certains perdent la vie dans l’exercice de leur fonction.

Les journalistes et les professionnels des médias participants à la 7ème édition du Forum de la Liberté de la Presse et l’Accès à l’Information, après avoir pris connaissance du message du Secrétaire général des Nations-Unies à l’occasion de la 32è Journée Mondiale de la Liberté de la Presse, les présentations et échanges sur le thème principal : « Informer dans un monde nouveau – L’impact de l’intelligence artificielle sur la liberté de la presse et les médias » et à l’issu des travaux qui ont été sous-tendus par le thème principal de cette édition 2025 du Forum : « Désinformation et discours haineux : enjeu de la liberté de presse en contexte électoral », les sous-thèmes sous-jacents, les résolutions issues des ateliers, ont marqué leur engagement dans la lutte pour la promotion et la défense du droit d’accès à l’information publique en tout temps mais aussi et surtout en période électorale

Considérant un certain nombre de faits, au rang desquels :

Le rang du Cameroun selon le dernier classement de Reporters Sans Frontières 2025, le Cameroun a dégringole du 130e au 131e rang mondial, et reste le dernier dans la sous-région Afrique centrale ;

L’Etat des lieux de la protection et sécurité des journalistes au Cameroun qui a montré qu’être journaliste est risqué ;

L’impunité dont jouissent jusqu’ici les bourreaux des hommes et femmes des médias au Cameroun ;

La régulation répressive qui appelle à la mise en place d’un véritable tribunal des pairs comme le Ministre de la Communication dit être lui aussi engagé dans ce chantier ;

Le non-respect de la présomption d’innocence et la privation de liberté, en violation des dispositions légales en vigueur dans les procédures de délit de presse ;

La sévère criminalisation des auteurs des délits de presse à travers la loi sur la lutte contre le terrorisme et la loi sur la cybercrimalité, notamment lorsqu’ils sont commis sur des plateformes numériques ;

Le difficile exercice du métier de journaliste sur l’ensemble du territoire national et singulièrement dans les trois régions du Nord-Ouest, Sud-Ouest et Extrême-Nord où règne l’insécurité avec la présence très prégnante des groupes armées qui y sévissent, tout en restant une sérieuse préoccupation dans la perspective des prochaines élections;

La désuétude de la loi sur la communication sociale au Cameroun ;

Le paysage médiatique de plus en plus infesté par la prolifération, des fake news, le discours de haine et le discours à caractère tribal publiés et diffusés par des professionnels;

La non-application des engagements pris par le Cameroun sur le plan international, conformément aux textes internationaux ratifiés;

La non-représentativité paritaire comme l’exige l’ONU dans les structures chargées d’encadrer et de réguler la presse au Cameroun ;

Les efforts faits par le gouvernement de la République pour faire dans la communication institutionnelle, à travers la création des sites internet des institutions étatiques qui ne sont malheureusement pas toujours mis à jour avec toutes les conséquences que cela engendre ;

La crise dans les medias qui a contraint au chômage des travailleurs du secteur ;

L’aide à la presse privée, à tête chercheuse, a maigri comme un pot de chagrin au fil des années ;

La prolifération des fakes news à travers les réseaux sociaux ;

L’aggravation de la violation de la liberté de la presse ;

La violation des traités et conventions internationaux ;

La non application de la Convention Collective des Journalistes ;

Les crimes sur les journalistes qui restent impunis ;

Faisant nôtres les différentes problématiques évoquées au cours de ce 7e Forum National de la Liberté de la Presse et l’Accès à l’Information ;

Nous, participants, nous engageons à travailler dans l’optique de:

Réduire à sa plus simple expression les fake news dans les publications afin de se démarquer des lanceurs d’alerte et autres influenceurs ;

Promouvoir davantage le respect de l’éthique et de la déontologie dans l’exercice de notre métier, l’un des leviers de la promotion de la cohésion sociale ;

Contribuer à éduquer les masses sur la désinformation et la manipulation de l’information ;

Encourager les rédactions à mettre en place en leur sein des unités de factchecking en cette période sensible ;

Encourager les journalistes à disposer de la clause de conscience ;

Faire du journalisme responsable et citoyen respectant l’expression plurielle de l’opinion en tout temps et tout lieu, particulièrement pendant les échéances électorales à venir ;

Humaniser le traitement de l’information chaque fois que nous sommes en situation de reportage ;

Ne pas servir de passerelle dans la prolifération du discours de haine, du discours tribal, aussi bien dans le traitement de l’information que dans l’animation des plateaux de débats ;

Continuer à travers les regroupements professionnels des hommes et femmes des medias et surtout les syndicats des journalistes à mener les concertations avec les autorités gouvernementales en vue de mettre sur pied un tribunal des pairs qui respecte les principes internationaux de la parité pour une autorégulation de la profession de manière indépendante, et plus crédible;

Encourager les organisations professionnelles de la presse à relancer la formation continue des journalistes et travailleurs des medias afin de palier certains manquements observés;

S’intéresser de plus en plus aux questions environnementales pour inciter les communautés vulnérables touchées par le changement climatique à apprécier les politiques publiques mises en œuvre afin d’éviter la désinformation et la mésinformation sur les questions environnementales ;

Créer un réseau des médias et organisations professionnelles afin de contribuer à la compilation rapide des tendances à travers le déploiement de tous les journalistes dans la couverture des échéances électorales à venir ;

Par ailleurs, nous exhortons le gouvernement de la République à :

Faire un toilettage juridique des dispositions légales liberticides contenues aussi bien dans le Code pénal que dans la Loi portant répression des actes de terrorisme et la loi sur la lutte contre la cybercriminalité, afin de ne plus passer les professionnels des medias comme des criminels potentiels;

S’arrimer aux traités et conventions signés et ratifiés sur le plan international afin de faciliter les conditions de travail des journalistes ;

Adopter une loi faisant de l’accès aux sources à l’information une obligation pour éviter la prolifération de la désinformation comme nous l’observons ;

Dépénaliser les délits de presse au profit des sanctions pécuniaires et travaux d’intérêt civique;

Faire appliquer la Convention collective des journalistes dont la caducité appelle à un amendement pour concourir à la liberté économique du journaliste condition sine qua none à la pratique d’un journalisme de qualité ;

Sécuriser en permanence les professionnels des medias dans l’exercice de leur fonction régalienne, même en zone de conflit, et lors de la couverture des échéances électorales à venir ;

Réglementer le fonctionnement des medias électroniques pour établir la différence entre les journalistes et les lanceurs d’alertes communicants des réseaux sociaux, source de confusion avec les professionnels des medias classiques ;

Lever le verrou sur l’article 40, alinéa 1, du statut général de la fonction publique de l’État du Cameroun, qui stipule que le « fonctionnaire est tenu à l’obligation de réserve dans l’exercice de ses fonctions » ;

Surseoir à la répression financière qui est engagée avec le lancement du recouvrement des frais des licences d’exploitation des radios, télévisions et diffuseurs à partir de l’exercice 2024, ce qui annonce des fermetures imminentes de plusieurs entreprises de presse qui ne vont pas pouvoir payer.

Fait à Douala, le 6 mai 2025

Leave a reply