Présidentielle 2025: les organisations signataires de cette déclaration appellent l’attention du Président de la République sur les risques de conflit violent, en l’absence d’un espace de dialogue multi acteurs et la nécessité de protéger le droit à la compétition électorale pour tous les citoyens camerounais

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” DECLARATION DES ORGANISATIONS DE LA SOCIETE CIVILE LIEE AU CONTEXTE ELECTORAL : ELECTION PRESIDENTIELLE D’OCTOBRE 2025 SOUS FOND DU VERROUILLAGE DE L’ESPACE CIVIQUE – RESTRICTIONS DE LA LIBERTE D’ASSOCIATION 

ACTION CIVILE 237

Alors que nous nous acheminons vers la date fatidique du 12 octobre, jour du scrutin présidentiel, le Cameroun lui se renferme dans un environnement de violence institutionnelle, sous la forme des restrictions des libertés publiques et plus spécifiquement, les menaces et suspicion sur le processus électoral, restriction de la liberté des médias et d’association, la liberté de circulation…

          a) De la restriction de l’espace civique par les interdictions de réunions et manifestations pacifiques et la violation de la liberté de la presse et d’expression :

– Depuis le 26 Juillet, date à laquelle le conseil électoral d’ELECAM a rendu publique la liste de 13 candidats retenus pour participer à l’élection du Président de la République et dont plusieurs candidats ont été recalé notamment le candidat du MANIDEM (Mouvement africain pour la Nouvelle Indépendance et la Démocratie) le Professeur Maurice KAMTO, le siège de ce parti politique est assiégé par une escouade de forces de police et de gendarmerie. Ces dernières interdisent l’accès audit siège à toute personne. Les deux conférences de presse prévues les 26 et 28 juillets au siège du MANIDEM ont été interdites par la des hommes en tenues, sans la moindre notification au responsable du parti, refoulant tous les journalistes venus pour la couverture médiatique.

– De janvier 2025, au moins 10 cas d’interdictions des réunions publiques et manifestations ont été enregistrés. Nous pouvons citer entres autres les cas d’interdictions des réunions et meetings des partis politiques tels que le PCRN, MRC, FCC.

– Depuis le début de cette année, le CNC (Conseil National de la Communication) a affligé des sanctions à quatorze (14) journalistes issus de 13 médias, allant d’un (1) mois à 6 mois de suspension pour les uns et les autres. Il a également servi des avertissements à deux (02) journalistes et à 01 patron de média de 03 médias différents. C’est le cas notamment des médias Equinoxe Télévision, Bnews1 télévision, Le Popoli, e-investigation, Infos Tv, etc…

     b) De la répression de certains leaders politiques et de la société civile 

– Le 08 Juin, pendant que le siège régional du MRC été assiégé par des homme en tenue, interdisant tout accès aux locaux, le Pr Maurice KAMTO a été tenu en état de siège dans un hôtel de la ville de Douala, puis conduit manu-militari hors de la ville. Sa résidence a également été bouclée par les forces de l’ordre pendant 48 heures.

– Le samedi 7 décembre 2024, à travers les réseaux sociaux, l’opinion publique a pris connaissance des arrêtés N° 000121/A/MINAT et N° 000122/A/MINAT du 06 décembre 2024, suspendant le REDHAC (Réseau des Défenseurs des Droits de l’Homme en Afrique Centrale) pour une durée de 3 mois, sans aucun avertissement ni mise en demeure, par le Ministre de l’Administration Territoriale. Le lundi 9 décembre 2024 les scellés ont été apposés sur les locaux du REDHAC par le Sous-préfet de Douala 1er accompagné d’un commissaire de police principal, ainsi que des éléments des forces de l’ordre, sans notification préalable. À ce jour, lesdits locaux restent scellés. Le 14 janvier 2025, la Co-PCA Me Alice NKOM et la Directrice Exécutive Maximilienne NGO MBE du REDHAC ont reçu des convocations pour se présenter à la Division de la Police Judiciaire du Littoral, le 22 janvier 2025. Malgré toutes les explications données lors de l’audition de ce 22 janvier 2025, la police judiciaire a envoyé le dossier au TPI de Douala-Bonanjo où elles sont actuellement poursuivies pour « bris de scellés et rébellion ».

– Le Ministre de l’Administration Territoriale a plusieurs fois, dans les sorties officielles et publiques, tenu des discours tendant à des menaces permanentes, qui insufflent la violence dans les esprits, ce qui n’est pas favorable à la construction d’une cohésion sociale dans un contexte électoral tendu.

   c) Des manquements observés dans le travail d’Elecam

Le code électoral, dans son article 80 dispose : « A l’issue des opérations de révision, et au vu des documents et données communiqués par les démembrements régionaux d’Elections Cameroon, le Directeur Général des Elections établit et rend publique la liste électorale nationale au plus tard le 30 décembre ». Nonobstant cette disposition pertinente de la loi électorale, Elecam n’a toujours pas rendu publique la liste électorale nationale.

Outre la non publication de la liste électorale nationale qui renforce les soupçons de fraude électorale, les organisations de la société civile ont pu observer une sorte de déficit de moyens matériels et humains au sein d’ELECAM. Plusieurs centaines de personnes mobilisées n’ont pas pu être enregistrées, faute de disponibilité de moyens soit matériel soit humain.

Les organisations de la société civile signataires :

* Observent que ces situations violent allégrement les lois nationales et les textes internationaux dument ratifiés par l’Etat du Cameroun en matière de droits humains et libertés

* Notent pour le déplorer, que l’Etat du Cameroun est classé en 2025, 131ème sur 180 pays en matière d’indice sur la liberté de la presse à travers le monde selon le rapport de Reporters Sans Frontière.

* Constatent le manque de volonté de la part de l’organe en charge des élections au Cameroun, à respecter de manière scrupuleuse les dispositions de la loi électorale notamment en ce qui concerne la publication de la liste nationale électorale.

* Dénoncent les actes de restriction de l’espace civique, de violation des libertés de la presse et d’expression ainsi que de répression envers les leaders politiques et de la société civile.

* S’inquiètent de l’acharnement judiciaire et administratif dont sont victimes certains leaders politiques et associatifs avec en toile de fond une volonté manifeste d’éloigner un concurrent politique

RAPPEL DES ENGAGEMENTS DE L’ETAT DU CAMEROUN

L’Etat du Cameroun a ratifié plusieurs conventions et pactes internationaux sur la nécessité du respect des droits civils et politiques, qui garantissent notamment la liberté d’expression de chaque citoyen. Ces engagements ont été pris tant au niveau national, régional qu’international.

Au niveau national

Préambule de la Loi 96/06 du 18 janvier 1996 portant révision de la Constitution du 02 juin 1972 modifiée et complétée par la loi n°2008/001 du 14 avril 2008

« Nul ne peut être inquiété en raison de ses origines, de ses opinions ou croyances en matière religieuse, philosophique ou politique sous réserve du respect de l’ordre public et des mœurs ; »

Au niveau régional

La commission africaine des droits de l’Homme et des Peuples, déclare en son titre I :

1. La Liberté d’expression et d’information, y compris le droit de chercher, de recevoir et de communiquer des informations et idées de toute sorte, oralement, par écrit ou par impression, sous forme artistique ou sous toute autre forme de communication, y compris à travers les frontières, est un droit fondamental et inaliénable et un élément indispensable de la démocratie.

2. Tout individu doit avoir une chance égale pour exercer le droit à la liberté d’expression et à l’accès à l’information, sans discrimination aucune.

Article 6 : les Etats partis s’assurent que les citoyens jouissent effectivement des libertés et droits fondamentaux de l’homme, en prenant en compte leur universalité, leur interdépendance et leur indivisibilité.

La Déclaration de principes sur la liberté d’expression en Afrique

Le droit à l’information doit être garanti par la loi, conformément aux principes suivants :

– Toute personne a le droit d’accéder à l’information détenue par les organes privés et qui est nécessaire à l’exercice ou à la protection de tout droit ;

– Nul ne doit faire l’objet de sanction pour avoir livré en bonne foi des informations sur des comportements illégaux ou qui divulguent des menaces sérieuses pour la santé, la sécurité ou l’environnement, sauf lorsque l’imposition de sanctions sert un intérêt légitime et est nécessaire dans une société démocratique ;

Au niveau international

La Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH) : L’article 19 garantit à chacun le droit à la liberté d’opinion et d’expression, y compris la liberté de recevoir et de diffuser des informations sans ingérence.

Le pacte International relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) : 

Article 9. 1. Tout individu a droit à la liberté et à la sécurité de sa personne. Nul ne peut faire l’objet d’une arrestation ou d’une détention arbitraire. Nul ne peut être privé de sa liberté, si ce n’est pour des motifs et conformément à la procédure prévue par la loi.

Article 19.

1. Nul ne peut être inquiété pour ses opinions.

2. Toute personne a droit à la liberté d’expression ; ce droit comprend la liberté de rechercher, de recevoir et de répandre des informations et des idées de toute espèce, sans considération de frontières, sous une forme orale, écrite, imprimée ou artistique, ou par tout autre moyen de son choix. Ces normes protègent les critiques, même sévères, envers un régime politique et ne peuvent justifier des mesures de répression ou d’extradition injustifiées.

Fort de ces engagements contenus dans les instruments internationaux pour lesquels le Cameroun est Etat-partie, les organisations de la société civile recommandons :

–    Aux acteurs institutionnels d’assurer leurs missions professionnelles de manière à garantir le libre exercice de tous les droits consacrés par la Constitution de la république du Cameroun a tous les citoyens ;

–   De mettre fin aux discours et attitude de menace et défiance du peuple souverain à l’approche d’une élection présidentielle déjà considérée par certains comme à haut risque

–   D’ordonner le retrait des de forces de l’ordre et de défense devant le siège du MANIDEM

–    De procéder à la réouverture des organisations ayant été scellées de manière irrégulière

Les organisations signataires de cette déclaration appellent l’attention du Président de la République sur les risques de conflit violent, en l’absence d’un espace de dialogue multi acteurs et la nécessité de protéger le droit à la compétition électorale pour tous les citoyens camerounais. ”

Fait à Douala le 04 Août 2025.

CONTACTS UTILES :

UN MONDE AVENIR : Philippe NANGA 677611007

CHRDA (Centre pour les droits de l’homme et la démocratie en Afrique) : Me AGBOR BALLA 679821499

NOUVEAUX DROITS DE L’HOMME : Cyrille Rolande BECHON 675447418 “

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