Hommage aux victimes du génocide des Tutsi au Rwanda: la Commission des Droits de l’Homme du Cameroun saisit l’occasion pour rappeler aux Camerounais la nécessité de s’engager davantage contre le négationnisme, l’intolérance et les discours de haine

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A l’occasion de la Journée internationale de réflexion sur le génocide des Tutsi au Rwanda en 1994 avec comme thème : « Mémoire, justice et prévention : ensemble pour un avenir sans génocide », la Commission des Droits de l’Homme de Cameroun (CDHC) a publié une déclaration le 7 avril 2025.

Grosso modo, l’Indh note que chaque année, des cérémonies se déploient à l’échelle mondiale, en particulier, au Rwanda, comme autant de temps forts de mémoire, de recueillement et d’éducation collective ; elles incarnent la volonté de rendre hommage aux victimes, de soutenir les survivants et de réaffirmer l’engagement contre le négationnisme, l’intolérance et les discours de haine. La Commission relève que les discours de haine peuvent se manifester de diverses manières, que ce soit lors d’interactions entre personnes ou à travers des plateformes en ligne et qu’ils englobent principalement :

– les attaques verbales qui sont des propos agressifs ou insultants visant une personne ou un groupe en raison de caractéristiques spécifiques ;

– l’utilisation d’éléments matériels ou de signes corporels (objets, gestes et symboles) pour exprimer ou promouvoir la haine d’autres ethnies, groupes communautés religieuses ou groupes.

La Commission salue de nouveau l’adoption de la loi du 29 décembre 2019 modifiant et complétant certaines dispositions de la loi du 12 juillet 2016 portant Code pénal qui prévoit et réprime _l’outrage à la tribu ou à l’ethnie_ aux alinéas 1 et 3 de son article 241-1 (nouveau) en ces termes :

[e]st puni d’un emprisonnement d’un (01) à deux (02) ans et d’une amende de trois cent mille (300 000) à trois millions (3 000 000) de francs, celui qui, par quelque moyen que ce soit, tient des discours de haine ou procède aux incitations à la violence contre des personnes en raison de leur appartenance tribale ou ethnique [;]

Lorsque l’auteur du discours de haine est un fonctionnaire au sens de l’article 131 [du Code pénal], un responsable de formation politique, de média, d’une organisation non gouvernementale ou d’une institution religieuse, les peines prévues à l’alinéa 1 ci-dessus sont doublées et les circonstances atténuantes ne sont pas admises.

La Commission se félicite de nouveau des alinéas 1 et 2 de l’article 77 de la loi du 21 décembre 2010 relative à la cybersécurité et à la cybercriminalité au Cameroun qui disposent qu’[e]st puni d’un emprisonnement de deux (02) à cinq (05) ans et d’une amende de 2 000 000 (deux millions) à 5 000 000 (cinq millions) FCFA ou de l’une de ces deux peines seulement, celui qui, par la voie de communications électroniques ou d’un système d’information, commet un outrage à l’encontre d’une race ou d’une religion [;] Les peines prévues à l’alinéa 1 ci-dessus sont doublées lorsque l’infraction est commise dans le but de susciter la haine ou le mépris entre les citoyens.

La Commission salue les efforts des pouvoirs publics et de leurs partenaires visant à lutter contre les discours haineux et à promouvoir la paix et le vivre-ensemble harmonieux, spécialement à travers la signature, le 6 mars 2025, par une quinzaine de dirigeants de médias camerounais, d’une « _Tribune dénonçant la prolifération des discours de haine_ », réaffirmant ainsi leur volonté commune de promouvoir des pratiques journalistiques responsables.

La Commission félicite l’organisation de la société civile _Civil Watch_ qui, à travers sa campagne # _ThinkB4UClick_ lancée sur sa plateforme d’information # _DefyHateNow_ , lutte activement contre les discours de haine sur l’Internet, principalement dans les réseaux sociaux, tout en promouvant des valeurs telles que l’empathie, la tolérance, l’unité et l’amour, qui participent de la culture de la paix au Cameroun, en appellant chaque individu à jouer un rôle actif dans la création d _’un espace numérique exempt de haine_ .

La Commission relève, pour le déplorer, la récurrence des conflits intercommunautaires dans les Régions de l’Adamaoua, de l’Extrême-Nord, de l’Ouest et du Sud, une situation exacerbée par des facteurs tels que des rivalités historiques et/ou les difficultés d’accès aux ressources naturelles, avec pour conséquences des dommages humains, matériels ainsi que des répercussions significatives sur la stabilité des Régions concernées.

Recommandations

La Commission recommande au Gouvernement de renforcer le cadre législatif et judiciaire, d’établir des mécanismes judiciaires spécialisés pour traiter les allégations de discours de haine et de crimes associés en comparution immédiate. En outre, elle  propose au Gouvernement d’atténuer les sentiments d’amertume provoqués par le chômage des jeunes et renforcer l’harmonie entre les communautés:

– en généralisant la culture entrepreneuriale, en multipliant les cadres de formation à l’auto-emploi et en veillant à sa systématisation dans toutes les filières de formation, dès les dernières années de l’enseignement primaire, des études internationales ayant établi que seuls 25 % des jeunes devaient avoir accès à un emploi salarié en Afrique subsaharienne entre 2014 et 2024 ;

– renforcer les politiques d’emploi au profit des minorités et des populations autochtones conformément à la Constitution et au Droit international, en encourageant les entreprises à recruter les personnes originaires de ces communautés vulnérables et à investir dans la formation des jeunes de ces communautés dans les lieux d’implantation des entreprises.

Par ailleurs, la CDHC  exhorte les parents à contribuer activement à la prévention de la discrimination ethno-tribale et des discours de haine, principalement en dissuadant leurs enfants, dès leur plus jeune âge, de recourir aux injures, aux discours haineux et en les éduquant sur leurs conséquences, en s’y opposant et en les réprimant ouvertement, fermement et systématiquement ;

– en inculquant à leur progéniture les notions de la diversité, d’inclusion, de solidarité, du respect mutuel, d’amour, d’interculturalité, de partage, d’égalité des Droits, de responsabilité, de pardon et d’acceptation de l’autre.

Correspondance particulière 

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